Après la machine à vapeur, l’électricité et l’automatisation, la « robolution » est une révolution industrielle incluant la fabrication additive. En travaillant dans un monde digital et virtuel, il est possible de refaire le chemin inverse par impression 3D et de revenir à la matière réelle.
Le concept centralisateur 4.0 correspond à une nouvelle façon d’organiser les moyens de production : l’objectif est la mise en place d’usines dites « intelligentes » (smart factories) plus flexibles, disposant d’une plus grande adaptabilité dans la production et d’une allocation plus efficace des ressources. Elle se caractérise par une interconnexion des machines et des systèmes au sein des sites de production, mais aussi entre eux et l’extérieur (clients, partenaires, autres sites de production). À travers le recours à l’Internet des objets, aux systèmes cyber-physiques et à la fabrication additive, c’est-à-dire aux réseaux virtuels servant à contrôler des objets physiques, cette nouvelle façon de produire se caractérise par une communication continue et instantanée entre les différents outils et postes de travail intégrés dans les chaînes de production et d’approvisionnement (Wikipédia, 2015 ; Hinks, 2015).
Dans le même temps, des amateurs qui se définissent comme des « makers » œuvrent avec des machines 3D de faible coût et exploitent les logiciels libres : chacun peut alors, avec un bon design, utiliser des données numériques pour réaliser/créer un objet. Ils s’appuient sur des principes d’économie ouverte qui reposent sur des contributeurs ne cherchant pas en premier lieu un profit immédiat et participent, souvent via des FabLabs, à l’information du public et à l’attractivité des technologies 3D.
L’impression 3D favorise ce mouvement de cyberculture avec des évolutions sociales diverses, tout en développant des liens scientifiques, technologiques, commerciaux et sociaux, possiblement conflictuels, avec les milieux socioéconomiques plus traditionnels de la fabrication additive. Ainsi, la fabrication additive ne se limite pas à l’entreprise, elle dispose de champs d’usage et d’utilisateurs beaucoup plus vastes. Ce cadre étant rappelé, il est intéressant de savoir pourquoi et comment on en est arrivé là ; c’est le propos de cet article.
« Dans cette société de passeurs, nous sommes capables de faire émerger de l’inattendu, de fertiliser et de transformer les idées en envies, puis en projets, et enfin en réalisations. Nous pouvons vivre avec plus d’efficience et d’harmonie. C’est une société plus juste, qui réinterroge les critères d’évaluation de réussite, où nous sommes plus heureux et moins superficiels, une société où nous arrivons à organiser et partager l’abondance. Le faire ensemble devient un plaisir libre. C’est une société où le plaisir, loin d’être absent, serait un principe fondamental, un droit essentiel » (Novel et Riot, 2013).
« Il y a assez de ressources sur cette planète pour répondre aux besoins de tous, mais pas assez pour satisfaire le désir de possession de chacun » (Gandhi).
« Dès lors que chacun est invité, voire fortement incité, à rechercher l’innovation dans une société ou dans une organisation, on peut escompter, par simple effet de nombre, une amélioration de l’efficacité globale et donc, à terme, de la productivité. Nouvelles procédures, nouveaux usages, nouveaux circuits, nouveaux objets, assortis d’une expertise permanente et d’un souci constant de la perfection, maintiennent en éveil le souci du progrès et l’idéologie même de la progression. L’avenir est livré comme un territoire à conquérir, riche de promesses d’abondance et de bonheur » (Rouquette, 2007).
« On croit volontiers que l’influence vient des lieux de pouvoir, qu’il faut être au cœur d’un réseau, faire partie de l’élite. Pour innover, il faudrait se conformer. Mais pour les psychologues sociaux, les véritables innovations fleurissent au contraire dans les marges et se propagent par le bas. Et le numérique renforce ce phénomène en donnant à chacun les moyens d’agir. Une innovation originale est immédiatement transmise et partagée » (Augagneur et Rousset, 2015).
« C’est contre elle-même que l’humanité doit être protégée, en faveur de la perpétuation de l’étrange équilibre dont elle est capable entre le fragile et le puissant, le subtil et l’utile » (Chabot, 2013).
« Une nouvelle génération d’objets manufacturés, pensés par des designers professionnels et « terminés » grâce aux data de l’utilisateur final peut voir le jour. Ce sont des e-objets. Ces objets d’un nouveau genre, issus du numérique et fabriqués à la demande grâce à la technologie de l’impression 3D, s’adaptent aux besoins de l’utilisateur final et annoncent ce monde merveilleux à la mesure de chaque homme, où la production de masse laisse la place à la personnalisation de masse » (Moreau, 2014).
« Intégrante et unificatrice, l’information mondialisée [...] renforce la tendance moderne à l’atomisation du corps social : elle rapproche les lieux, mais elle disjoint les groupes » (Breton, 1991).
« La technologie se propose d’être l’architecte de nos intimités » (Turkle, 2015).