L’utilisation des ressources renouvelables pour l’élaboration de substances chimiques et de matériaux représente un sujet actuel très important et a attiré l’attention des chercheurs du monde entier, issus des secteurs académiques et industriels. En effet, depuis le tout début des années 2000, la synthèse de monomères et de polymères à partir de ressources renouvelables est l’objet d’importants efforts de recherche en raison de la volatilité des prix des produits pétroliers, associée à l’accroissement des préoccupations environnementales. Les ressources renouvelables, appelées aussi biomasse, font référence à tout matériau présentant une origine biologiques récente, y compris les matières végétales, les matières animales, les cultures agricoles et même les coproduits et les déchets fermentescibles. Les matières premières renouvelables les plus largement utilisées pour l’élaboration de substances chimiques et de matériaux sont le bois, les protéines, la cellulose, la lignine, les tanins, les amidons, les substances oléochimiques, telles que les huiles végétales, et les ressources animales comme la chitine et le chitosan…
Une grande variété de substances chimiques ont déjà été préparées à partir de ces matériaux dérivés de la biomasse et certaines d’entre elles sont industrialisées et commercialisées. Les huiles végétales telles que les huiles de soja, de tung, de lin, de colza, de ricin conduisent notamment depuis de longues années à de nombreux produits pour une grande variété d’applications.
Parmi ces huiles, l’huile de coque de noix de cajou ou Cashew Nut Shell Liquid (CNSL) est un co-produit agricole abondamment disponible dans de nombreuses parties du monde dont la structure chimique est unique, car elle contient un fragment phénolique avec une chaîne latérale non saturée à 15 carbones. Le CNSL n’est pas comestible, donc son utilisation en tant que matière première pour la chimie n’exerce aucune compétition avec la chaîne d’approvisionnement alimentaire, contrairement à d’autres matières premières renouvelables telles que les huiles alimentaires. Les trois principales classes de composés phénoliques issus de ressources renouvelables sont la lignine, les tanins extraits du bois et le CNSL. Si la lignine et les tanins sont massivement disponibles dans la biomasse, leur disponibilité commerciale est limitée au regard de celle du CNSL. Ainsi, le CNSL peut potentiellement remplacer le phénol dans de nombreuses applications avec des résultats équivalents voire meilleurs. Une plus grande utilisation du CNSL comme matière première pour la chimie et l’élaboration de polymères est envisageable, compte tenu de sa production importante (> 900 kt. par an), de son faible coût et de sa structure chimique ouvrant la voie à de nombreuses réactions. Plusieurs revues ont été publiées, décrivant notamment la composition, les réactions ou les applications du CNSL. Le présent article propose de présenter les divers aspects de l’utilisation du CNSL pour la chimie en s’intéressant notamment à l’accès au CNSL, aux différentes réactions envisageables et aux produits dérivés. Cet article présente notamment le CNSL comme un précurseur pour la synthèse de divers produits tels que des monomères, des polymères et des additifs.
Le lecteur trouvera en fin d’article un glossaire des termes utilisés.