Tant pour ses besoins vitaux que pour de multiples activités, le bord des cours d’eau et le littoral ont toujours constitué pour l’homme des lieux d’implantation privilégiés. Sur ces territoires, pour se prémunir des inondations fluviales ou des submersions marines, ont été aménagés des « systèmes d’endiguement », ensemble organisé de digues, généralement associées à d’autres structures ou aménagements hydrauliques (murs de protection, structures de fermeture, dispositifs de rétention, stations de pompage, etc.).
La protection offerte par ces systèmes est néanmoins limitée : lorsque les phénomènes naturels dépassent une certaine intensité, les ouvrages laissent passer l’eau, soit par surverse, soit au travers d’une brèche en cas de rupture accidentelle. Dans un cas comme dans l’autre, il peut en résulter une aggravation de l’aléa, notamment par une accélération des phénomènes hydrauliques. L’effet positif de réduction de la fréquence des inondations produit par le système d’endiguement étant plus immédiatement perceptible que ses effets négatifs potentiels, cela produit souvent une fausse impression de sécurité.
L’aménagement des « systèmes de protection » au fil des siècles a donc modifié l’expression de l’aléa dans les zones endiguées, mais sans le supprimer. En outre, dans une période plus récente, l’exposition des enjeux a sensiblement augmenté : l’attractivité croissante des bords de mer et de rivière et surtout, la raréfaction des emprises disponibles sur ces sites ont conduit à implanter des enjeux vulnérables dans des zones situées à basses altitudes ou dans des « cuvettes » sujettes à des phénomènes de submersion rapide.
Au-delà de cet état de fait, la maîtrise du risque inondation dans les zones endiguées se heurte à de multiples incertitudes : les sollicitations hydrauliques, les évolutions morphologiques du milieu et l’évolution de l’état des ouvrages ne peuvent être qu’imparfaitement connues.
Le constat que nous pouvons dresser est donc double : d’une part une augmentation de la vulnérabilité par une concentration des enjeux sur les sites exposés à un aléa fort et d’autre part une protection dont le principe est équivoque (puisque dans certains cas, l’aléa peut être aggravé) et dont la performance est soumise à de multiples incertitudes.
Il apparaît donc nécessaire d’améliorer la sécurité des systèmes d’endiguement par :
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la compréhension du fonctionnement et des risques de défaillance de ces systèmes ;
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l’évaluation régulière de leurs performances et des risques résiduels en lien avec les phénomènes naturels identifiés ;
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la réalisation des travaux de maintenance, de confortement ou d’adaptation nécessaires à l’atteinte des performances recherchées.
Après avoir apporté quelques éléments fondamentaux de connaissance, notamment par une mise en perspective historique, le présent article traite du diagnostic et de l’analyse de risque des systèmes d’endiguement, démarche essentielle pour éclairer les prises de décision en matière de gestion ou d’intervention. Des recommandations techniques sont ensuite apportées pour l’adaptation de ces systèmes, en relation avec des considérations réglementaires (réglementation française) et économiques.
Si le cas de la révision complète d’un système d’endiguement est présenté, par contre, le cas de son aménagement ex nihilo avec l’implantation de nouveaux enjeux n’est pas traité. (Ce dernier cas impliquerait a priori un accroissement de l’exposition à l’aléa, donc une augmentation non acceptable du risque.)
Signalons enfin que la gestion des risques d’inondation sur un site s’effectue par la mise en œuvre d’un ensemble de mesures cohérentes destinées à réduire ces risques. (Sur les principes de prévention des risques naturels majeurs et sur la réglementation qui en découle, se référer à [TBA250]. Sur les plans et méthodes de prévision et de prévention du risque inondation, se référer à [TBA251].) Nous n’aborderons ici la gestion du risque inondation que sous l’angle des structures influant la propagation des eaux. Mais il convient de rappeler que ce dispositif doit être complété par des actions de prévision des événements naturels à l’origine des inondations et par d’autres mesures destinées à réduire la vulnérabilité des enjeux, notamment humains (urbanisation contrainte par un plan de prévention des risques, gestion de crise au travers d’un plan d’urgence prévoyant le cas échéant des refuges ou une évacuation de la population…). Sur le thème des systèmes d’alerte précoce pour les inondations soudaines (crues éclair), l’article [P4225] pourra être consulté en complément.