Malgré la signature de la Convention d’Interdiction des Armes Chimiques (CIAC) par la quasi-totalité des pays du monde (seuls la Corée du Nord, l’Égypte et le Soudan du Sud n’ont pas signé la CIAC ; Israël l’ayant signé mais pas ratifié), une effrayante résurgence des armes chimiques est récemment apparue au cours de différents conflits (attaque au sarin à Khan Cheikhoun en Syrie en avril 2017), ou encore d’attentats terroristes (assassinat de Kim Jong-nam à Kuala Lumpur en février 2017, attentat dans le métro de Tokyo en 1995). La CIAC proscrit la production d’armes chimiques à large échelle mais les stocks mondiaux en armes chimiques anciennes restent également importants ; la question de leur destruction et le développement de méthodes plus sûres constituent donc un défi d’actualité. Si la plupart des pays occidentaux signataires du CIAC se sont dotés au cours des dernières années de sites de destruction sécurisés, le cas Syrien a soulevé de nouvelles problématiques. En effet, compte tenu de la situation de conflit interne et du refus de nombreux états d’accueillir le stock d’arme Syrien pour destruction sur leur territoire (1 033 t de gaz moutarde et 300 t de sarin et de VX officiellement), la décontamination a eu finalement lieu en mer, pendant 2 ans, à bord du « Cape Ray » un bateau américain équipé d’une plateforme de traitement chimique, le « Field Deployable Hydrolysis System » (FDHS). Malheureusement les effluents résultants de ce traitement sont colossaux (plusieurs dizaines de litres d’eau/litre d’agent traité) et doivent être retraités à un coût parfois plus élevé que la neutralisation du toxique. La France, quant à elle, possède sur son territoire environ 300 tonnes d’armes chimiques stockées datant de la première Guerre mondiale. Le programme SECOIA (Site d’Élimination des Chargements d’Objets Identifiés Anciens) a été initié en ce sens : la méthode de destruction utilisée repose sur une destruction automatisée par explosion dans une enceinte blindée puis les déchets sont récupérés, conditionnés puis traités. L’efficacité opérationnelle de ce procédé dans le cadre d’obus fossiles est la plus sécurisée car automatisée, et elle prendra plusieurs dizaines d’années pour détruire les stocks actuels. La découverte de 10 à 20 tonnes supplémentaires chaque année aggrave d’autant plus le problème que toutes les armes chimiques découvertes ne sont pas éligibles pour SECOIA qui n’accepte que les engins intègres (sans fuites de toxique). Le personnel de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) doit alors pratiquer un traitement de neutralisation dépendant du type de toxique. Il est donc essentiel de disposer de méthodes efficaces et durables pour neutraliser efficacement les agents chimiques de guerre sous différents conditionnements et sur différents lieux. Cet article propose de décrire les dernières avancées dans le domaine de la neutralisation des molécules toxiques présentes dans les armes chimiques. Il s’agit de l’utilisation de méthodes récentes (2000-2018) issues du monde académique (catalyse, réacteur en flux continu) permettant d’économiser les quantités de réactifs et/ou de faciliter le traitement à large échelle de façon sûre.