Brevet ou secret ? Au stade de l’idée et même lors de sa première formalisation, la réponse est simple : préserver la confidentialité est indispensable !
En effet, si votre idée doit demeurer secrète pour des raisons stratégiques, de marketing ou encore juridiques (non-brevetabilité par exemple), la mise en place d’une politique de confidentialité apparaît évidente.
Cependant, de la même manière, si cette idée doit faire l’objet d’une demande de brevet mais également d’un dessin et modèle, sa validité sera conditionnée par sa nouveauté. Or, cette nouveauté est susceptible d’être détruite, non seulement par des tiers qui auraient pu en prendre connaissance, mais également par le demandeur qui ferait état de son invention avant que celle-ci ne soit déposée : on parle alors d’autodivulgation.
Quel que soit le mode de protection choisi, il est donc impératif, dès le stade des recherches susceptibles d’aboutir à une création, d’en préserver la confidentialité.
Pour cela, il est recommandé de conclure des accords de confidentialité avec toutes les personnes pouvant connaître les aspects de l’invention, notamment les salariés, sous-traitants, fournisseurs et partenaires. L’étendue des accords de confidentialité devra être rigoureusement définie.
Notamment, tous les modes de communication de l’information confidentielle devront être précisés.
Exemples : il a pu être jugé que l’envoi par fax à un sous-traitant, non tenu au secret, du schéma d’un dispositif divulguant les moyens de l’invention avant la date de dépôt du brevet constitue une divulgation destructrice de nouveauté (CA Paris, 27 novembre 2002, RG n° 00/07234, PIBD 2003, n° 763, III, 234 ; réf. B20020188, base de données de l’INPI).
De même, la communication d’un devis faite par une entreprise à une autre, lequel révélait les éléments caractéristiques de l’invention, a été jugée destructrice de nouveauté dans la mesure où ce devis ne mentionnait pas la confidentialité des éléments échangés (Cass. com. 19 mai 1987, pourvoi n° 86-11598).
En pratique, l’existence d’un accord écrit n’est pas obligatoire : ainsi des relations d’affaires confidentielles de manière générale peuvent suffire à assurer la confidentialité du projet. Néanmoins, une telle option est déconseillée.
En effet, en cas de difficulté, l’absence d’accord de confidentialité écrite spécifique peut rendre très délicate la preuve de la violation de la confidentialité. Ainsi, par arrêt du 17 mars 2015 (Cass. com. pourvoi n° 13-15862, 17-3-2015), la Cour de cassation a-t-elle approuvé un arrêt sévère ayant retenu que l’obligation de confidentialité étant d’interprétation stricte, elle ne peut résulter implicitement de l’existence de relations commerciales. Dès lors, si un accord de confidentialité n’est pas obligatoirement écrit, il est cependant nécessaire de rapporter la preuve de l’existence d’une telle obligation.
Par ailleurs, afin de renforcer la sécurité juridique des opérations réalisées dans le cadre d’un projet confidentiel, il est conseillé d’ajouter la mention « confidentiel » ou toute autre mention similaire sur les documents échangés dans le cadre du projet.
L’existence d’un engagement de confidentialité ne permet pas nécessairement de faire échec à la divulgation effective de l’invention mais permet de :
- préserver le caractère de nouveauté de l’invention à l’égard des tiers qui y sont soumis ;
- poursuivre les auteurs de la divulgation à des tiers sur le fondement de la violation contractuelle.
Pour renforcer cette obligation et protéger au mieux vos intérêts, n’hésitez pas à inclure dans vos accords une clause pénale, afin de dissuader la divulgation et réparer votre préjudice en cas de manquement de votre cocontractant à son obligation.
L’existence d’une clause de confidentialité n’empêche pas de mettre en œuvre l’ensemble des moyens nécessaires à préserver la confidentialité effective de l’invention.
En tout état de cause, l’existence d’une clause de confidentialité est inopérante si, par ailleurs, l’absence totale de discrétion dans l’élaboration de l’invention ou lors des essais de l’invention conduit à sa divulgation au public.
Gestion de la confidentialité : quel accord, à quelle occasion ? Type de contrat | Quand ? | Pourquoi ? |
Charte de confidentialité en entreprise | À tout moment | Diffuser les bonnes pratiques au sein de l’entreprise. |
Contrat de travail | Lors de l’embauche | Le Code du travail (art. L. 1221-2) prévoit que le contrat de travail est exécuté de bonne foi dont il découle un devoir de loyauté du salarié L’insertion d’une clause de confidentialité permet de préciser l’étendue de l’obligation et de la faire perdurer à l’expiration du contrat |
Accord de confidentialité bipartite | Au cas par cas | Reporter un engagement de confidentialité sur un tiers, par exemple un prestataire ou un sous-traitant |
Accord de confidentialité multipartenaires | Dès les premiers contacts en vue du projet de R&D | Sécuriser ses informations confidentielles |
Convention de stage | Si des stagiaires ou du personnel extérieur sont employés | Organiser la confidentialité et la cession des droits de PI dont le stagiaire (ou son employeur, laboratoire, université, etc.) pourrait se prévaloir |
Conditions d’accès à une plate-forme collaborative | Si une plate-forme collaborative accessible est mise à disposition des partenaires | Gérer la confidentialité des informations rendues accessibles sur la plate-forme |