Selon le nouveau rapport quinquennal de l’Agence européenne de l’environnement, publié ce 29 septembre, la dégradation de la biodiversité, du climat et des ressources naturelles met en péril la prospérité et la sécurité des Européens, et l’inaction coûterait plus cher que la transition. Dès lors, restaurer la nature, sécuriser la ressource en eau, réduire les émissions et boucler les flux matériels ne sont plus des options, mais des conditions de la prospérité européenne.
Dans un article relayant les conclusions du rapport de l’Agence européenne de l’environnement (EEA), The Guardian résume l’alerte : la dégradation du climat et de la biodiversité « met en jeu le mode de vie européen ». Le journal renvoie au septième état des lieux (« SOER ») publié tous les cinq ans par l’EEA, qui établit un lien direct entre l’intégrité des écosystèmes et la compétitivité économique du continent.
Le document de référence – Europe’s environment and climate : knowledge for resilience, prosperity and sustainability – a été mis en ligne par l’EEA ce 29 septembre 2025. Les conclusions insistent sur le fait que les tendances environnementales pèsent déjà sur la productivité, la sécurité et la santé publiques, et que « reculer » les politiques vertes renchérirait le coût final de l’action.
Sur la nature, le diagnostic reste sévère. Ainsi, selon l’évaluation State of Nature in the EU, 81 % des habitats protégés sont en état « médiocre ou mauvais », sous la pression d’usages intensifs des terres, de la pollution et du changement climatique. Sans inflexion, l’EEA ne voit aucun indicateur de biodiversité sur une trajectoire susceptible d’atteindre les objectifs 2030.
Côté climat, l’EEA confirme un affaiblissement de 30 % du puits de carbone terrestre européen (secteur UTCATF/LULUCF(1) ) sur la période 2014-2023 par rapport à la décennie précédente, sous l’effet combiné des dynamiques forestières (exploitation, incendies, ravageurs). Cette contraction fragilise l’atteinte des objectifs de retraits nets à horizon 2030.
La ressource en eau apparaît, pour sa part, comme un point de tension croissant. L’EEA indique que le stress hydrique touche déjà un tiers de la population et du territoire européens. Il devrait d’ailleurs s’intensifier sous l’effet du réchauffement, avec des impacts sur l’agriculture, l’énergie et le tourisme. Ce constat recoupe ses analyses publiées en 2024, qui chiffrent l’exposition annuelle au stress hydrique à 30 % des habitants et 20 % du territoire.
Les émissions de gaz à effet de serre poursuivent quant à elles une trajectoire baissière. L’EEA évalue à environ 31 % la réduction entre 1990 et 2022, avec un recul record de 8 % en 2023, porté par la baisse du charbon, la montée des renouvelables et la sobriété conjoncturelle. Mais les secteurs transport et alimentation/agriculture restent en retard. Ainsi, les émissions liées au transport n’affichent qu’une tendance faiblement baissière depuis 2005, et l’agriculture ne s’est réduite que marginalement sur la même période.
Sur la qualité de l’air, l’EEA rappelle par ailleurs une amélioration notable. Les décès prématurés attribuables aux particules fines ont notamment presque été divisés par deux depuis 2005, plaçant l’UE en trajectoire vers l’objectif « zéro pollution » 2030 (- 55 % vs 2005). Ces progrès confirment l’utilité d’un cadre réglementaire renforcé.
La circularité des matériaux, en revanche, progresse trop lentement. La part des matières recyclées dans l’usage total de matériaux n’atteint ainsi que 11,8 % en 2023, contre 10,7 % en 2010, loin du doublement visé d’ici 2030. Pour l’EEA, la hausse de cette part suppose à la fois davantage de recyclage et une réduction de la consommation de matériaux, en particulier minéraux non métalliques.
L’inaction coûtera plus cher que la transition
Politiquement, le message est clair : « Nous ne pouvons pas nous permettre d’abaisser nos ambitions », martèle la directrice executive de l’EEA, Leena Ylä-Mononen, tandis que des responsables européens soulignent que le coût de l’inaction dépasserait largement celui de la transition. L’Agence appelle à « accélérer » l’application des politiques du Pacte vert (décarbonation du transport et de l’industrie, restauration de la nature, adaptation) pour préserver la compétitivité et la résilience du continent.
Pour les décideurs publics comme pour les directions R&D/affaires publiques, l’implication est double. Il s’agit, d’une part, d’intégrer l’adaptation (eau, chaleur, incendies, santé) dans la planification industrielle et urbaine ; d’autre part, d’accélérer l’innovation bas-carbone et circulaire afin de corriger les retards sectoriels identifiés, notamment dans le transport et l’agriculture. Le message du SOER-2025 est technique mais sans ambiguïté : restaurer la nature, maîtriser les risques climatiques et boucler les flux matériels sont des prérequis à la prospérité européenne, non des coûts accessoires.
(1) Utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie









Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE