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Un projet européen de recherche pour doper le rendement du tournesol

Posté le par Nicolas LOUIS dans Chimie et Biotech

La Commission européenne vient de lancer un programme de recherche qui vise à réduire l'absorption de l'oxygène chez le tournesol afin de limiter le mécanisme de la photorespiration. Son objectif est de favoriser la photosynthèse pour augmenter les rendements.

Après avoir travaillé sur l’optimisation des apports en nutriments et en eau des plantes ainsi que sur leurs besoins de protection, la recherche agronomique s’intéresse de plus en plus à la photosynthèse pour augmenter les rendements. La marge de progrès est considérable puisque seulement 2 % de l’énergie du soleil est utilisée pour produire de la biomasse. La Commission européenne vient de lancer un programme de recherche, doté d’un budget de huit millions d’euros et nommé Gain4crops, qui vise à améliorer l’efficacité photosynthétique en limitant la photorespiration.

À l’origine, il y a plus de trois milliards d’années, la photosynthèse se déroulait dans une atmosphère pauvre en oxygène. La rubisco, l’enzyme qui assimile le CO2 pour le transformer en sucre, captait le CO2 de l’air ainsi que l’oxygène de manière non sélective. Aujourd’hui, ce processus se poursuit chez les plantes sauf que l’atmosphère est beaucoup plus riche en oxygène. Conséquence : la fixation de l’oxygène provoque un mécanisme de photorespiration et entraîne une baisse de la fixation du carbone et donc des rendements. Ce phénomène est d’autant plus important que les températures de l’air grimpent.

Une absence de compétition entre l’oxygène et le CO2

Le programme de recherche européen va s’inspirer de certaines plantes tropicales, comme le maïs, qui ont naturellement développé des stratégies pour limiter l’assimilation de l’oxygène. On les appelle les plantes en C4, car chez elles, la photosynthèse produit des molécules constituées de quatre atomes de carbone. Ces plantes ont la particularité de réaliser la photosynthèse dans deux cellules distinctes alors que chez les plantes en C3, dont les rendements sont pénalisés par la photorespiration, elle est réalisée dans une seule. « Chez les plantes en C4, étant donné que la photosynthèse est réalisée dans deux endroits différents, il n’y a pas cette compétition entre l’oxygène et le CO2, explique Giovanni Finazzi, chercheur au CNRS. Elles ont une efficacité, d’un point de vue de la photosynthèse, beaucoup plus élevé, mais consomment également beaucoup plus d’eau pour faire face à leur croissance. »

Le projet Gain4crops a donc pour ambition de s’intéresser aux plantes en C3 pour les transformer en C4. Il se focalisera uniquement sur le tournesol. Cette plante est en effet bien implantée dans l’agriculture européenne, mais surtout, présente l’intérêt d’offrir, à l’intérieur de sa famille, des variétés en C3, C4 et certaines dans une situation intermédiaire et que l’on nomme des plantes C3-C4. En analysant l’ensemble de cette famille, les chercheurs vont tenter de comprendre quelle est la logique des mécanismes mis en place par la nature pour passer d’une plante C3 à C4. « Nous allons nous appuyer sur la physiologie naturelle du tournesol, qui a la capacité innée d’évoluer vers des métabolismes améliorés » ajoute Giovanni Finazzi. Les scientifiques souhaitent également sélectionner les plantes, dont les rendements sont les plus élevés, afin d’identifier certains gènes spécifiques responsables de ces performances. Le but étant ensuite de transférer ces gènes pour créer un nouveau tournesol plus productif.

La phase finale de ce travail de recherche consistera à construire de nouveaux métabolismes chez le tournesol. À l’aide de modèles mathématiques, les chercheurs vont calculer le passage de nouveaux flux à l’intérieur de la plante et analyser quelles sont les contraintes cinétiques et thermodynamiques auxquelles elle doit faire face.

Un tournesol C4 dans cinq ans

Depuis de nombreuses années, des scientifiques du monde entier tentent de diminuer l’assimilation de l’oxygène par la rubisco. Les États-Unis ont par exemple essayé de fabriquer un riz C4, mais pour l’instant sans succès. D’autres travaux de recherche sont en cours dans ce pays, dont de nombreux financés par la fondation de Bill Gates. Le projet Gain4crops se donne cinq ans pour fabriquer un tournesol C4. « Notre intention n’est pas de construire un monstre de laboratoire, prévient Giovanni Finazzi. Cette nouvelle plante doit être cultivable par les agriculteurs. Notre projet inclut un partenariat avec le semencier Corteva Agriscience afin de tester des variétés de tournesol d’intérêt agronomique ». A terme, l’expérience acquise avec ce projet pourrait servir de feuille de route pour doper les rendements sur d’autres plantes que le tournesol.

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Posté le par Nicolas LOUIS


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