Avec l’urbanisation croissante des sociétés modernes, la nécessité d’optimiser l’usage de l’espace et des ressources s’est très vite associée à une demande sociale afin de mieux prendre en compte les conséquences des nouveaux aménagements sur l’environnement. La complexité croissante des projets avec la multiplicité des thématiques représente aujourd’hui un challenge majeur pour les ingénieurs et les scientifiques. De manière logique, les méthodes capables d’appréhender toute la complexité d’un projet s’appuient de plus en plus sur les concepts et les outils de la modélisation mathématique. En parallèle, les procédures d’évaluation se sont structurées afin d’apporter une aide efficace aux ingénieurs et aux décideurs tout en permettant une communication vers les usagers et le public.
Depuis les années 1990, le principe de l’évaluation environnementale s’est développé comme un nouvel outil d’aide à la décision en particulier en Amérique du Nord et dans différents pays européens. Utilisée notamment dans le cadre de l’aménagement du territoire, ce processus d’évaluation permet ainsi de déceler, très tôt, les effets globaux d’un projet et des conflits potentiels qu’il peut induire. Le processus donne lieu à des rendus dont les conclusions sont utilisées pour la décision des autorités publiques concernées.
Cette approche est reconnue comme un moyen efficace, souple et évolutif d’intégrer les préoccupations environnementales et le développement durable au plus haut niveau des organes de décision et de les informer des conséquences probables des actions proposées. Les principaux avantages de l’évaluation environnementale stratégique sont :
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examiner la justification, la nécessité, la faisabilité et les alternatives d’une politique publique, d’un plan ou d’un programme et vérifier leur compatibilité environnementale pour orienter le choix vers des variantes plus favorables à l’environnement ;
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prendre en compte les problèmes environnementaux à la source au lieu de se limiter à traiter leurs symptômes et leurs impacts, comme dans le cas des études d’impact sur l’environnement qui sont consacrées à des espaces plus réduits ;
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créer un contexte adéquat pour l’étude d’impact sur l’environnement, en récoltant un bon nombre de données environnementales à un niveau supérieur de planification ;
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mettre en évidence les éventuels effets cumulatifs au niveau régional.
La modélisation numérique connaît un essor rapide avec l’accroissement des moyens de calcul, l’amélioration des méthodes numériques et l’acquisition des mesures in situ avec de nouvelles générations de capteurs. La maturité des modèles thématiques et leur association dans un système complexe permettent aujourd’hui d’aborder l’environnement naturel dans une approche holistique, plus à même de fournir les informations attendues pour la prise de décision.
Cet article fait suite à celui publié en 1997 par Jean A. Cunge [C 180] et consacré aux modèles mathématiques en hydraulique et en hydrologie. Il s’articule également avec les articles de Gérard Nicollet et de Gérard Labadie [C 184] sur les modèles hydrauliques fluviaux, de Jacques Viguier [C 182] sur les modèles en hydraulique maritime et de Jean-Robert Courivaud [R 2 330] sur les mesures in situ en hydraulique à surface libre. Cet article est destiné à présenter les principes de la modélisation mathématique dans le cadre de l’évaluation environnementale. Des informations nouvelles ont été introduites en ce qui concerne les aspects législatifs et réglementaires ainsi que la problématique posée par les incertitudes et leur prise en compte dans le processus de décision.