La chromatographie en phase supercritique, CPS (ou SFC pour Super-critical Fluid Chromatography), met en œuvre une phase mobile constituée d’un fluide ou d’un mélange de fluides généralement porté au-delà du point critique par un contrôle adéquat de la température et de la pression.
Cette technique est complémentaire des chromatographies en phases liquide,[nbsp ]CPL (ou LC Liquid Chromatography), et gazeuse, CPG (ou GC Gas Chromatography), car elle possède des caractéristiques propres, liées aux propriétés des fluides supercritiques : la masse volumique du fluide super-critique, comparable à celle d'un liquide, associée à une plus faible viscosité et, pour le dioxyde de carbone, une grande compatibilité avec les détecteurs de la CPG et de la CPL, en font une technique très performante, principalement avec les colonnes remplies de la CPL (les applications mettant en œuvre les colonnes capillaires de la CPG étant devenues rarissimes). Ainsi :
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de grandes efficacités par unité de temps sont atteintes en raison de la diffusion rapide des solutés dans les fluides supercritiques du fait de leur faible viscosité ; aussi, des séparations peuvent-elles être obtenues en des temps d'analyse environ 5 à 10 fois plus courts qu'en CPL, pour une granulométrie de phase stationnaire identique ;
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on peut aussi, pour la même raison, augmenter la longueur de la colonne et disposer alors d'une très grande efficacité, même avec les colonnes remplies ; cela est beaucoup plus difficile à réaliser en CPL à cause de la perte de charge élevée ;
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des sélectivités importantes sont observées en raison des interactions entre les solutés, la phase stationnaire et la phase mobile que l'on peut faire varier par l'ajout de faibles quantités de modificateurs polaires à la phase supercritique ; la CPS s'apparente donc à la chromatographie de partage en phase normale, même si la plupart des phases stationnaires de la CPL, y compris celles de la phase inverse et de la chiralité, peuvent être employées avec succès ;
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la CPS est une technique « verte » du fait qu'elle utilise comme phase mobile majoritairement du dioxyde de carbone, atoxique, à la place de solvants organiques. La consommation des solvants organiques est donc réduite et, pour les applications à l'échelle industrielle, le CO2 peut être facilement recyclé et purifié ;
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la CPS préparative présente, par ailleurs, l'avantage de permettre une récupération des solutés par simple détente de la phase mobile, les seules traces de solvants résiduels provenant des additifs polaires éventuellement ajoutés. Cela a aussi son importance en extraction en phase supercritique dans le domaine alimentaire par exemple ;
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contrairement à la CPL, la CPS, avec une phase dioxyde de carbone pur, autorise le couplage avec le détecteur à ionisation de flamme (DIF) de la CPG. On peut donc avantageusement la mettre en œuvre pour la séparation d'un mélange complexe de solutés peu ou non volatils solubles dans le CO2 supercritique et non aisément détectables comme les hydrocarbures saturés par exemple.
Aussi, on comprend que la CPS trouve ses applications dans le domaine pétrolier lorsqu'elle est couplée à la détection DIF – domaine pour lequel les colonnes capillaires ont encore un intérêt – et, surtout, dans le domaine pharmaceutique, en particulier pour les séparations des énantiomères où elle est utilisée en routine depuis le milieu des années 1990. Depuis 2010, le renouvellement de l’offre en chromatographes performants pour la CPS par des grandes sociétés d’instrumentation constitue un facteur très favorable à son extension dans tous les domaines pour lesquels la CPL est la technique de choix.
Cet article expose le principe et les avantages de la CPS dans les domaines où elle trouve des applications en incluant les dernières avancées techno-logiques et pratiques.