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Une pile à biocarburants à base de papiers pour le marché de l'IoT

Interview

BeFC : Une pile à biocarburants à base de papiers pour le marché de l’IoT

Posté le par Nicolas LOUIS dans Énergie

La start-up BeFC a développé une biopile enzymatique légère et flexible, et constituée d'un assemblage de couches de papiers. Totalement biodégradable, elle permet d'alimenter en électricité des dispositifs électroniques jetables de faible puissance. Rencontre avec la manager produit de l'entreprise.

Créée en 2020, la start-up BeFC (Bioenzymatic Fuel Cells) est une spin-off du CNRS. Elle développe une technologie dont les travaux de recherche académique ont débuté il y a une quarantaine d’années. À l’origine, les scientifiques souhaitaient concevoir une pile à biocarburants capable de transformer le sang et l’oxygène présents dans le corps humain en énergie pour alimenter des pacemakers. Aujourd’hui, l’entreprise fabrique des biopiles ou biocellules enzymatiques à destination du marché de l’IoT (Internet of Things). Elles se révèlent légères et flexibles, et surtout sont totalement biodégradables, et ne contiennent pas de produits chimiques dangereux pour l’environnement. Entretien avec le Dr. Marie Berthuel, la manager produit de l’entreprise.

Techniques de l’Ingénieur : Présentez-nous la technologie développée par BeFC ?

Dr. Marie Berthuel, manager produit chez BeFC
Dr. Marie Berthuel, manager produit chez BeFC. Crédit : BeFC

Marie Berthuel : Nos biopiles sont constituées d’un assemblage de couches de papiers, plus précisément de papiers cellulose et carbone. Deux électrodes – la bioanode et la biocathode – sont supportées par ces papiers en carbone, sur lesquels sont également immobilisées des enzymes. Leur rôle est de transformer des substrats tels que le sucre et l’oxygène en électricité. Le glucose est un composé que l’on ajoute sur le papier, tandis que l’oxygène provient de l’air. Concrètement, à la bioanode, les enzymes vont oxyder le glucose en gluconolactone et cette oxydation va créer des électrons. De l’autre côté du circuit, à la biocathode, les enzymes vont réclamer ces électrons afin de réduire l’oxygène en eau. Ce mouvement d’électrons a pour effet de créer un courant électrique.

Quels types d’enzymes utilisez-vous, et quelle puissance est délivrée par vos biopiles ainsi que leur durée de vie ?

Je ne peux pas vous décrire précisément nos enzymes, car elles sont au cœur de notre secret industriel. Il existe déjà, depuis plusieurs décennies, des enzymes capables d’oxyder du glucose d’un côté et de réduire de l’oxygène de l’autre. Tout notre savoir-faire est d’avoir développé des enzymes particulières et des méthodes spécifiques pour les faire fonctionner dans notre dispositif. Nous ne produisons pas ces enzymes, mais nous nous adressons à des producteurs qui possèdent l’expertise pour en produire.

Quant à la puissance, elle est de l’ordre du milliwatt par cm², cela signifie que plus on augmente la surface, plus l’énergie délivrée est importante. Nos biopiles sont activées grâce à des fluides environnementaux ou biologiques et leur durée de vie est comprise entre plusieurs heures à plusieurs semaines. Cela dépend de l’application et à quel point elle est énergivore. Nous travaillons pour augmenter leur durée de vie, et espérons atteindre une durée de plusieurs mois à l’avenir.

Quelles sont les applications de votre technologie ?

Elle s’adresse au marché de l’IoT, au smart packaging et à l’ensemble des dispositifs électroniques jetables, de faible puissance, en remplacement des piles boutons. Notre principal débouché se situe dans le secteur de la logistique, afin de suivre des colis. En plus de fabriquer des biopiles, nous concevons également des cartes électroniques capables de suivre plusieurs paramètres comme la température, l’humidité, la pression, les chocs, le pH… Ces cartes sont équipées d’un microcontrôleur, d’une mémoire pour stocker les données et d’un module de communication pour les transférer. Nous les développons dans une démarche écoresponsable, en imprimant la plupart des composants électroniques, afin de réduire leur impact sur l’environnement.

Carte électronique BeFC et pile à biocarburants BeFC
En haut, une carte électronique développée par BeFC, et en bas, une pile à biocarburants. Crédit : BeFC

À quel stade se trouve votre projet ?

Notre entreprise fabrique 1 000 unités par jour à l’aide d’un bras robotisé qui assemble les biopiles couche après couche. Nous sommes entrés dans une phase d’industrialisation et nous optimisons actuellement nos lignes de production. En 2024, notre objectif est de produire un million d’unités par jour. En attendant, des contrats de codéveloppement ont été signés avec nos clients pour tester notre procédé. Ces clients veulent digitaliser leurs produits, mais ne souhaitent plus utiliser des batteries traditionnelles miniatures à base de lithium ou alcalines. Ils sont présents dans le secteur de la logistique, du traitement des déchets, du packaging de luxe, de la santé et de l’industrie 4.0. Nous avons un client dans le domaine médical qui a besoin de notre technologie pour réaliser le suivi de tests urologiques. Ce client est coté Nasdaq, et lorsque nous aurons démarré notre production de masse, ses besoins seront supérieurs à 100 millions d’unités par an.

Nous sommes pionniers dans le monde des biocellules enzymatiques, et ce même du côté de la recherche académique.

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Posté le par Nicolas LOUIS


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