Après le spectre d’une augmentation des taxes douanières, le président américain pourrait aller plus loin dans le rapport de force en demandant aux entreprises de la tech d’augmenter leurs tarifs ou même de collaborer encore plus étroitement avec les différents départements d’État. Objectif ? Exploiter des informations commerciales ou sensibles. C’est déjà le cas, mais il pourrait pousser encore plus loin le curseur. L’Europe prépare sa défense avec des solutions dites de « souveraineté numérique ».
Arrivé pour la seconde fois à la maison blanche, Donald Trump se comporte comme un joueur de poker à coup de bluffs, de gestuelles et de propos intimidants. Objectif : remporter le bras de fer qui l’oppose au reste du monde ou presque. Et cela ne se limitera pas uniquement aux taxes douanières.
Aux États-Unis, en matière de numérique et de protection des données à caractère personnel, tout ce qui a été validé avec l’Europe pourrait être remis en question et en particulier le Règlement général sur la protection des données à caractère personnel (RGPD), mais aussi tous les accords sur l’exploitation des données.
Résultat, le concept de « souveraineté numérique » revient en force dans les médias et dans les milieux politiques et économiques français et européens. La souveraineté numérique est un concept qui désigne la capacité d’un État, d’une organisation ou d’un individu à exercer un contrôle sur ses données numériques, ses infrastructures technologiques et ses communications électroniques.
Elle implique la maîtrise des technologies de l’information et de la communication (TIC) ainsi que la protection des données personnelles et sensibles contre les intrusions et les abus.
Pour les entreprises, la souveraineté numérique est essentielle pour protéger leurs actifs immatériels, tels que les données clients, les secrets commerciaux et les innovations. La maîtrise de leurs infrastructures technologiques leur permet de se prémunir contre les cyberattaques, les fuites de données et les espionnages industriels. Elle offre également un avantage concurrentiel en permettant le développement de solutions technologiques innovantes et sécurisées.
Pour les citoyens, la souveraineté numérique garantit la protection de leurs données personnelles et de leur vie privée. Elle leur permet de contrôler l’utilisation de leurs données et de se protéger contre les abus et les violations de leurs droits fondamentaux.
Cependant, il existe un décalage entre la reconnaissance de l’importance des solutions technologiques françaises ou européennes et leur adoption. Selon un sondage Ipsos publié par l’Usine Digitale, 78 % des décideurs reconnaissent l’importance des solutions technologiques locales…
… Mais seuls 32 % en font une priorité dans leurs décisions d’investissement. Ce sondage, réalisé auprès de 4 000 actifs en France, Allemagne, Espagne et Italie, révèle que 46 % des répondants européens sont préoccupés par la dépendance aux plateformes comme Google, Microsoft ou Amazon. Mais là aussi, on constate des freins à l’adoption de solutions européennes. Les deux principaux sont le coût élevé et les doutes sur leur fiabilité. L’argument tarifaire ne tient pas vraiment, car si demain Microsoft décide d’augmenter de 25 % le tarif de son abonnement à « Microsoft 365 », que feront la majorité des entreprises qui utilisent quotidiennement les solutions de cet éditeur ? Rien, certainement car elles sont trop habituées — et dépendantes — de l’univers de Windows…
Pour renforcer leur souveraineté numérique face aux géants américains, les Européens disposent de plusieurs options. La première est de développer des alternatives européennes aux services des GAFAM. Une belle idée qui a coûté très cher pour l’instant !
Les projets de « cloud » français, comme Numergy et Cloudwatt, lancés en 2010, se sont révélés être des échecs financiers, coûtant 56 millions d’euros à l’État. Malgré des investissements massifs dans la French Tech, la dépendance aux GAFAM persiste, coûtant plus de cent milliards d’euros selon Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance (Banque publique d’investissement) depuis 2013.
La deuxième option est de renforcer la réglementation en matière de protection des données et de concurrence, comme le RGPD. Mais ce n’est semble-t-il pas l’option retenue par l’Europe. L’UE va assouplir sa réglementation dans les semaines à venir.
Cette initiative s’inscrit dans une stratégie plus large de « simplification normative » pilotée par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, visant à renforcer la compétitivité des entreprises européennes face à leurs homologues américaines et chinoises. Résultat, le RGPD va connaître sa première grande révision en devenant moins contraignant.
En conclusion, la souveraineté numérique est un enjeu stratégique pour les États, les entreprises et les citoyens. Elle permet de garantir l’indépendance technologique, la sécurité nationale et la protection des droits fondamentaux. Face à la domination des GAFAM, les Européens doivent développer des alternatives, renforcer la réglementation et coopérer pour renforcer leur souveraineté numérique. Après les paroles, il faut surtout passer aux actes !
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