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UE : La fausse interdiction des moteurs thermiques en 2035

Posté le par Matthieu Combe dans Énergie

L’UE interdira les moteurs thermiques carburant aux énergies fossiles en 2035. Le texte interdit ainsi les véhicules essence, diesel et hybride, au profit du 100% électrique. Mais la voie des carburants de synthèse sera finalement bien ouverte.

L’Union européenne avait prévu en 2022 d’interdire les moteurs thermiques en 2035. Mais début mars, l’Allemagne avait créé la surprise en bloquant le texte au conseil de l’Union européenne, manifestant son souhait de développer les carburants synthétiques. Le texte avait pourtant fait l’objet en octobre d’un accord entre États membres, dont l’Allemagne, et négociateurs du Parlement européen, et avait été formellement approuvé mi-février par les eurodéputés.

En raison de cette abstention sur le texte sur cette dernière étape, le vote avait été reporté sine die. Sans l’Allemagne, la majorité qualifiée des 27 qui est requise (vote favorable d’au moins 55 % des États représentant au moins 65 % de la population de l’UE) n’était en effet plus atteinte.

La Commission européenne et l’Allemagne ont finalement annoncé samedi 25 mars avoir trouvé un accord pour débloquer le texte. Ce dernier reste inchangé. Mais Bruxelles s’est engagée à une dérogation pour les véhicules utilisant du carburant synthétique (ou e-fuels), comme le demandait l’Allemagne, dans une proposition séparée. Celle-ci devra être validée d’ici à l’automne 2024.

Des carburants synthétiques après 2035

Les véhicules équipés d’un moteur à combustion pourront être immatriculés après 2035 s’ils utilisent exclusivement des carburants neutres en termes d’émissions de CO2, s’est réjoui le ministre allemand des Transports, Volker Wissing. Ces carburants synthétiques peuvent être produits par un mélange entre du CO2 et de l’hydrogène. Le premier pourrait être récupéré dans l’atmosphère ou capturé en sortie des usines, le second produit par électrolyse de l’eau grâce à des énergies renouvelables.

Pour la filière automobile, cette décision permettra de prolonger l’utilisation des moteurs thermiques. Mais l’usage de cette technologie dans l’automobile est contesté, car elle demande beaucoup d’électricité. Elle coûte aussi cher, a peu de chances de s’imposer sur le marché des véhicules particuliers et ne concernerait dans le meilleur des cas qu’une minorité de véhicules de luxe, estiment de nombreux experts.

Porsche et Ferrari, notamment, soutenaient la position de l’Allemagne. Le premier a inauguré sa première usine de production en Chili en décembre 2022. Le second mise toujours sur les moteurs thermiques. « La bonne nouvelle pour nous, c’est que nous allons pouvoir continuer à vendre des moteurs thermiques en plus de nos moteurs électriques », a de son côté réagi le  PDG de Ferrari, Benedetto Vigna auprès de Reuters.

Des carburants pour les plus riches qui retardent l’action climatique

Dans un rapport, l’ONG Transport & Environnement estime que l’essence synthétique pourrait coûter plus de 2,82 euros par litre à la pompe en France en 2030, soit presque 50 % de plus que l’essence ordinaire aujourd’hui. « Le coût plus élevé des e-fuels signifiera que seuls les riches pourront se les offrir, tandis que tous les autres seront poussés à contourner les règles et à utiliser de l’essence fossile à la place. Les automobilistes et le climat seront perdants », estime Marie Chéron, responsable des politiques véhicules à T&E France.

Julia Poliscanova, directrice principale des véhicules et de la mobilité chez Transport & Environnement, estime même cet accord dangereux. « Les carburants de synthèse sont une diversion coûteuse et massivement inefficace de la transformation vers l’électrique qu’affrontent les constructeurs automobiles européens. Dans l’intérêt de la crédibilité climatique de l’Europe, l’accord sur les voitures zéro émission de 2035 doit entrer en vigueur sans plus tarder. »

Du fait des ressources limitées en e-fuels, autoriser la vente de moteurs à combustion après 2035 pourrait priver les voitures existantes de cette solution nécessaire à leur décarbonation. « Si l’essence de synthèse est employée dans les nouvelles voitures, les véhicules déjà en circulation consommeront 135 milliards de litres d’essence fossile supplémentaires et émettront 320 MtCO2e de plus d’ici à 2050 que si l’essence de synthèse était disponible pour le parc automobile existant », projette Transport & Environnement.

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