Une équipe de chercheurs de l’université suédoise Chalmers a démontré une corrélation entre la présence d’enzymes capables de dégrader les plastiques et le niveau de pollution des océans. Ils ont ainsi identifié 30 000 enzymes homologues capables de dégrader 10 types de plastiques. Les chercheurs espèrent que les résultats obtenus permettront de faire émerger de nouvelles enzymes exploitables dans de futurs procédés de recyclage.
Depuis quelques années, l’utilisation d’enzymes est une solution envisagée pour aider au recyclage et à la dégradation des déchets plastiques. La technologie de recyclage enzymatique du PET développée par la société française Carbios, pionnière dans le développement de solutions enzymatiques dédiées à la fin de vie des polymères plastiques et textiles, en est le meilleur exemple.
La découverte de l’équipe de chercheurs de Chalmers laisse entrevoir toute l’étendue du potentiel de ces enzymes qui demeurent mal connues.
La pollution des océans par les plastiques, un enjeu mondial
Depuis les débuts de l’utilisation à grande échelle des matières plastiques dans les années 1950, leur production n’a cessé de croître, de même que les problèmes liés à la gestion de leur fin de vie.
Si de nombreux pays développés font des efforts en matière de recyclage et de valorisation, ces efforts doivent encore être accentués pour donner des résultats tangibles. En outre, toutes les zones du globe ne disposent pas des mêmes moyens et la mise en place de filières organisées est aussi complexe que coûteuse. Or, c’est un fait : plus des trois quarts des déchets plastiques s’amoncellent sur les sites d’enfouissement du monde entier, ce qui contribue à alimenter une pollution plastique qui continue de se propager dans tous les océans du monde.
Traiter le problème de la pollution plastique des océans fait ainsi partie des grands enjeux de notre époque.
La production mondiale de plastique ne cessera de croître dans les prochaines décennies, selon les estimations du Programme des Nations Unies pour l’environnement et GRID-Arendal.
Des enzymes en augmentation dans les zones polluées
Dans l’article publié en open access dans la revue Microbial Ecology, les chercheurs détaillent comment ils ont exploré la capacité des micro-organismes à dégrader les plastiques.
En premier lieu, ils ont compilé un ensemble de données concernant les 30 000 enzymes dont cette capacité a été démontrée avec des preuves expérimentales basées sur du séquençage. Ceci leur a permis de construire une bibliothèque de modèles de Markov cachés [NDLR outils pour le traitement, l’exploration, la classification, l’étiquetage, le clustering de données séquentielles et de signaux complexes] , qu’ils ont utilisée pour exploiter des jeux de données métagénomiques [NDLR relatives aux génomes de toutes les populations d’un milieu donné] à l’échelle mondiale couvrant une collection variée d’océans, de mers et d’habitats terrestres.
Les résultats obtenus indiquent clairement une corrélation entre la présence d’enzymes et le taux de pollution. Dans un communiqué de presse, Aleksej Zelezniak, professeur associé en biologie des systèmes de l’université Chalmers, explique : « À l’aide de nos modèles, nous avons trouvé de nombreux éléments de preuve qui confirment que le potentiel de dégradation des plastiques du microbiome mondial est en forte corrélation avec les mesures de la pollution plastique environnementale – une démonstration notable de la façon dont l’environnement répond aux pressions que nous lui imposons. »
Jan Zrimec, auteur principal de l’étude et ancien postdoctorant du groupe de recherche d’Aleksej Zelezniak, ajoute : « Nous ne pensions pas trouver de telles quantités de ces enzymes dans des habitats microbiens et environnementaux aussi variés. Il s’agit d’une découverte surprenante qui illustre bien l’ampleur du problème. »
Exploiter les enzymes les plus prometteuses
Parmi ces nombreux types d’enzymes, quelles sont celles qui sont potentiellement exploitables dans des procédés industriels de recyclage enzymatique ? C’est la question à laquelle l’équipe de chercheurs espère répondre dans de prochains travaux.
Aleksej Zelezniak l’affirme : « L’étape suivante consisterait à tester les candidats enzymes les plus prometteurs en laboratoire afin d’étudier de près leurs propriétés et le taux de dégradation des plastiques qu’ils peuvent atteindre. À partir de là, vous pourriez créer des communautés microbiennes dotées de fonctions de dégradation ciblées pour des types de polymères spécifiques. »
Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE