Les nanotubes de carbone (NTC) sont dans l'idéal décrits par l'enroulement sur lui-même d'un feuillet de graphène (une des couches dont la superposition forme le graphite). Leur faible diamètre (de 0,5 nm pour les plus fins à quelques dizaines de nanomètres pour les plus larges) associé à leur longueur, pouvant aller du micron à quelques centimètres dans les cas les plus extrêmes, leur confère un facteur de forme très élevé et les classe dans la catégorie des nanomatériaux monodimensionnels. Ils peuvent comporter un ou plusieurs tubes concentriques et l'on parle alors de NTC monoparoi (ou monofeuillet) ou multiparoi (ou multifeuillet).
Il est hasardeux de fournir des données économiques précises concernant la production et l'utilisation des NTC au niveau industriel puisque les sources fiables sont rares et que les données des fabricants sont le plus souvent exprimées en capacité de production, ce qui peut être très différent des quantités réellement produites et commercialisées. Des inventaires institutionnels, tels que par exemple celui du Woodraw Wilson Institute , proposent des exemples de produits disponibles sur le marché et déclarés comme contenant des NTC, ou soupçonnés d'en contenir. De nombreux rapports de consultants industriels (qui recyclent généralement les mêmes données dont les sources ne sont ni dévoilées ni vérifiables) décrivent cependant un marché florissant et en constante expansion. Dans les faits, les NTC sont très utilisés dans les domaines de l'énergie (batteries rechargeables), des matériaux composites (dont le secteur automobile), et des peintures. Ils sont généralement utilisés en faible proportion dans ces produits, mais leur commercialisation à grande échelle laisse supposer au final la production à des tonnages importants. La France a été précurseur avec l'obligation de déclaration annuelle, depuis 2013, de « la fabrication, importation ou production des substances à l'état nanoparticulaire », et avec la création de la base R-Nano qui rassemble les données issues de ces déclarations. Bien que les données de la base soient protégées par des accords de confidentialité, un rapport annuel permet par exemple de suivre depuis cette date l'évolution de la production et des usages des nanomatériaux en général. La question de l'impact sur la santé se pose essentiellement au niveau des travailleurs, qui sont dans les faits les seuls à être potentiellement exposés aux NTC tels que fabriqués. En effet, une fois incorporés dans des produits de grande consommation, les risques d'exposition des utilisateurs sont très faibles en conditions normales d'usage, puisque les NTC sont encapsulés dans des matrices, ou tout simplement inaccessibles pour l'utilisateur. À notre connaissance, il n'existe en effet aucune application actuellement sur le marché dans laquelle des NTC seraient en contact direct avec l'homme comme cela pourrait être le cas en cosmétique, dans l'alimentaire (directement dans les aliments ou dans des emballages alimentaires), ou encore dans le domaine de la santé, même si beaucoup de travaux de recherche ont été publiés sur ce sujet. Une libération progressive en cas d'usure « normale » de produits en contenant ne peut pas être exclue, si les conditions d'usage s'y prêtent . La fin de vie des nanomatériaux n'étant pas soumise à une réglementation particulière, une libération progressive dans l'environnement après mise en décharge par exemple, est envisageable. Dans ce cas, avec une contamination attendue de tous les compartiments environnementaux, c'est finalement la population générale qui pourra être exposée indirectement par ce biais, même si cela se produit a priori à bien plus longue échéance et surtout avec une exposition à des NTC aux caractéristiques probablement fort éloignées de celles des NTC initialement incorporés dans les produits incriminés (enrobage par des matrices, fonctionnalisation non covalente par la matière organique naturelle, etc.). Les concentrations alors présentes dans l'environnement seraient extrêmement faibles même si elles peuvent localement (contamination accidentelle liée à un accident de transport, accumulation locale du fait de conditions particulières) être plus importantes. Il faut mentionner que dans le cas des nanotubes de carbone, l'incinération est a priori une méthode permettant leur élimination totale puisqu'ils brûlent intégralement à la température d'un incinérateur d'ordures ménagères par exemple. Cependant, en conditions dégradées, une combustion incomplète d'un nanocomposite à matrice polymère contenant des NTC pourrait conduire à un relargage de NTC dans les fumées .
L'objet de cet article n'est pas de présenter en détail les NTC dont les propriétés extraordinaires (mécaniques, électriques, thermiques), et les multiples applications ont déjà été décrites et ont déjà fait l'objet de plusieurs dizaines d'articles dans les Techniques de l'Ingénieur. Le choix est fait ici de se focaliser sur les aspects liés à l'impact potentiel des NTC sur la santé et sur l'environnement, en proposant une mise à jour des connaissances sur ces questions dans ces deux domaines.