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Des tournesols et colza tolérants aux herbicides à surveiller

Posté le par Matthieu Combe dans Environnement

L’Anses rend un nouvel avis relatif à l'utilisation des variétés rendues tolérantes aux herbicides (VRTH) cultivées en France. L’agence sanitaire préconise la mise en place d’un dispositif de suivi et une meilleure traçabilité.

En 2011, l’Inra et le CNRS avaient rendu une première expertise collective concernant les plantes rendues tolérantes aux herbicides (VRTH) sur la base d’expériences en Amérique du nord et du sud. Les VRTH se sont depuis développées en France jusqu’à atteindre 27 % des surfaces de tournesol et 2 % des surfaces de colza en 2017. Soit un total d’environ 190 000 hectares. Dans un nouvel avis, l’Anses a donc décidé de documenter l’utilisation des VRTH en France afin d’analyser les risques agronomiques liés à leur culture.

Des recommandations pour mieux surveiller les VRTH

« Nous avons confirmé le risque de résistance des adventices [mauvaises herbes, NDLR] aux herbicides, un risque d’augmentation de l’utilisation des herbicides et en fin de compte, d’une contamination accrue des milieux par les herbicides », partage Ohri Yamada, responsable de la phytopharmacovigilance à l’Anses et auteur du rapport. « Cet état des lieux inédit met en lumière les limites des données actuelles : les dispositifs de suivis et de traçabilité sont insuffisants ». Dans ces conditions, l’Anses recommande de mettre en place un dispositif de suivi afin de surveiller les éventuels effets indésirables liés à la culture de ces semences.

L’Agence demande la création d’une liste officielle dans les catalogues officiels français ou européen pour identifier les variétés VRTH cultivables. Elle recommande la recherche des résidus d’herbicides associés aux VRTH dans les tournesols et colzas VRTH récoltés, dans le cadre des plans nationaux de surveillance de résidus de pesticides. Enfin, l’agence préconise la mise en place d’une étude spécifique pour vérifier la formation éventuelle de métabolites lors du traitement de parcelles VRTH.

Des VRTH obtenues par mutagenèse aléatoire

La culture des organismes génétiquement modifiés (OGM) obtenus par transgenèse étant interdite en France, tous les VRTH cultivés dans le pays sont obtenus soit par des sélections variétales classiques, soit par mutagenèse aléatoire. La sélection variétale consiste à sélectionner les plantes naturellement tolérantes aux herbicides et à les croiser avec d’autres lignées existantes. « Dans le cas de la mutagenèse aléatoire, on expose les graines à des agents mutagènes pour provoquer des mutations accélérées, détaille Ohri Yamada. On sélectionne ensuite les survivants qui résistent à la famille des herbicides qui nous intéresse. »

« Dans les faits, la cible sur lequel l’herbicide va naturellement se fixer pour tuer la plante est modifiée, poursuit Ohri Yamada. En France, presque tous les VRTH sont tolérantes à la famille des inhibiteurs de l’acétolactate synthase [ACS], une enzyme spécifique des végétaux ». En absence de cette enzyme, les herbicides n’ont donc pas d’impact sur les VRTH, mais vont tuer les adventices.

Une réglementation à mieux définir

Les partisans des VRTH expliquent que dans certaines situations, elles constituent la seule solution technique pour traiter une parcelle sans tuer les plantes cultivées. C’est notamment le cas avec l’ambroisie à feuilles d’armoise en Rhône-Alpes, une espèce envahissante qui se développe dans le tournesol et est très difficile à éliminer des parcelles. En plus, les VRTH permettraient de tuer les adventices, même lorsqu’elles ont levé, ce qui permet de traiter à vue de façon plus précise.

Selon la Réglementation sur les OGM, tous les VRTH obtenus par mutagenèse aléatoire sont exempts d’évaluation des risques avant leur mise sur le marché. Il n’existe pas plus de suivi de l’utilisation de ces semences. En 2015, neuf organisations paysannes et de la société civile avaient porté un recours auprès du Conseil d’État pour mieux encadrer la mise sur le marché des VRTH. Celui-ci a alors invité la Cour de justice de l’Union européenne à se prononcer sur la question. En juillet 2018, elle a rendu un arrêt sur les organismes issus de mutagenèse. Selon elle, les organismes obtenus par mutagenèse constituent des OGM et sont, en principe, soumis aux obligations prévues par la directive sur les OGM. Depuis, le Conseil d’État n’a toujours pas adopté de position officielle sur la manière d’appliquer cet arrêt.

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Posté le par Matthieu Combe


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