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Une ligne pilote stratégique pour recycler les aimants permanents européens

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Une ligne pilote stratégique pour recycler les aimants permanents européens

Posté le par Nicolas LOUIS dans Matériaux

Orano et le CEA ont mis en service une ligne pilote unique en Europe pour recycler et refabriquer des aimants permanents de haute performance. Ce projet s'appuie sur deux consortiums composés d'une vingtaine de partenaires européens. Son objectif est de sécuriser l'approvisionnement en métaux critiques indispensables à la transition énergétique.

Un jalon stratégique pour la souveraineté industrielle européenne a été franchi. Le groupe Orano et le CEA viennent d’inaugurer une ligne pilote dédiée au recyclage et à la fabrication d’aimants permanents de haute performance à base de terres rares. Leur fabrication repose sur des métaux stratégiques, notamment le néodyme et le dysprosium, aujourd’hui produits et transformés essentiellement en Chine. Dans un contexte de dépendance accrue et de tension sur les ressources, cette initiative s’inscrit dans une logique de sécurisation des approvisionnements en Europe.

Fruit de plus de dix ans de recherche et de développement, cette ligne pilote de 220 m², installée sur le site du CEA à Grenoble, a été retenue dans le cadre du plan France Relance et du programme européen Horizon Europe. Elle associe les expertises métallurgiques d’Orano, héritées notamment du cycle du combustible nucléaire, et les savoir-faire du CEA Liten en matière de métallurgie des poudres et d’économie circulaire.

Le projet s’articule autour de deux consortiums européens regroupant une vingtaine d’entreprises et des instituts de recherche. Le premier, appelé Magellan, vise à développer une voie de recyclage « en boucle courte » par fusion et doit permettre de conserver les terres rares sous leur forme métallique, tout en réduisant de manière significative l’intensité énergétique du procédé. Cette voie évitera également les séparations des différents éléments constitutifs des aimants permanents (Néodyme-fer-bore) et le recours à des procédés plus polluants.

Le second consortium, nommé Magnolia, est axé sur le recyclage par poudre des aimants frittés usagés riches en terres rares lourdes. Son objectif est de diminuer la quantité de dysprosium utilisée tout en préservant ou en améliorant les propriétés des aimants. Il doit aussi permettre une fabrication « net-shape », un procédé consistant à donner à la matière sa forme finale en une seule étape, afin d’en améliorer le rendement.

Une éolienne offshore nécessite environ six tonnes d’aimants permanents

L’ambition de ce second consortium dépasse les seules expérimentations techniques. Il vise aussi à développer une véritable filière industrielle, capable de collecter et de démanteler les moteurs électriques, de valoriser les aimants usagés et de fabriquer de nouveaux aimants plus performants, à un coût compétitif et moins consommateur de matières critiques. À terme, cette filière pourrait contribuer à fournir une partie des besoins européens en aimants permanents, en sachant qu’un moteur de traction de véhicule électrique nécessite entre un et deux kilos d’aimants, et une éolienne offshore de 10 MW (Mégawatt) environ six tonnes.

La question de la qualité des alliages sera l’un des défis technologiques de ce projet. Pour que ces aimants recyclés atteignent le niveau de performance exigé par les applications industrielles avancées, il est indispensable de garantir une pureté chimique et une homogénéité cristalline irréprochables. La moindre impureté ou variation dans la composition des alliages peut en effet altérer les propriétés magnétiques et compromettre la fiabilité des composants. Cette exigence impose donc des procédés de recyclage d’une extrême précision, capables de restructurer la matière pour restituer des aimants aux performances comparables à celles fabriquées à partir de matières premières vierges.

Ces aimants permanents à base de terres rares jouent un rôle crucial dans la transition énergétique, car ils entrent dans la fabrication de moteurs de véhicules électriques et des turbines d’éoliennes, et sont aussi essentiels à d’autres secteurs industriels, notamment celui de la défense. Les enjeux de ces différents projets sont d’autant plus importants que d’ici 2030, le CRM Act (Critical Raw Materials Act), un règlement européen, impose de recycler au moins 25 % de la consommation de matières stratégiques, dont les terres rares. Dans le même temps, le Net-Zero Industry Act, un autre règlement européen, reconnaît les aimants permanents comme des composants essentiels aux technologies bas-carbone et incite à réduire leur dépendance vis-à-vis d’un seul fournisseur.

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Posté le par Nicolas LOUIS


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