Dans un contexte global, mondialisé et très concurrentiel, l’intelligence économique consiste à collecter, analyser, valoriser, diffuser et protéger l’information économique stratégique ou les savoirs, afin de renforcer la compétitivité d’un État, d’une organisation ou d’un établissement de recherche entraînant de ce fait une prise de conscience de l’ensemble des opérateurs sur l’impact de la diffusion de l’information et des savoirs.
Pourquoi mettre en place un système de management de la sécurité ?
La réduction des risques agit sur la sécurité des laboratoires et constitue l’un des enjeux forts de très nombreux laboratoires afin de protéger leur savoir-faire et de rester compétitifs à l’échelon national et international. L’amélioration continue des performances en matière de sécurité nécessite, en plus d’une approche normative, une très bonne connaissance technique et réglementaire au regard des dangers et des risques du laboratoire. Structurer son système de management de la sécurité conduit donc le laboratoire à une analyse complète de ses processus de production de savoir et peut avoir des incidences fortes sur son organisation ou sa notoriété. Le potentiel scientifique et technique de la Nation est constitué de l’ensemble des biens matériels et immatériels propres à l’activité scientifique et au développement technologique. Son dispositif de protection a été réformé en 2012 et concerne, au sein des établissements de recherche, les savoirs, savoir-faire et technologies sensibles ou stratégiques dont le détournement ou la captation pourraient :
-
porter atteinte aux intérêts économiques de la Nation ;
-
renforcer des arsenaux militaires étrangers ou affaiblir les capacités de défense de la Nation ;
-
contribuer à la prolifération des armes de destruction massive ;
-
être utilisés à des fins terroristes.
Le détournement et la captation sont pénalement sanctionnés et s’articulent essentiellement autour de ZRR, avec un contrôle d’accès physique et logique des laboratoires.
Or, une partie de la communauté scientifique française critique les procédures ainsi mises en œuvre :
-
le faible niveau de protection qu’elles procurent en raison de l’inadaptation de leurs dispositifs aux risques, comme le souligne la lettre ouverte « De la PPST des laboratoires publics de recherche en informatique et de l’inanité des ZRR comme solution à un vrai problème » de Jean-Marc Jézéquel, directeur de l’IRISA ;
-
la gêne considérable qu’elles occasionnent pour les centres de recherche ;
-
une application uniforme de toutes les contraintes sans tenir compte des particularités ;
-
une concertation insuffisante avec les services de sécurité, notamment lors du classement en ZRR et du refus de recrutement.
Il en résulterait, selon ces critiques, un handicap significatif des centres de recherche français, une lourdeur administrative et des coûts induits. Dans un contexte international très compétitif, les ZRR pourraient ainsi peser sur le développement des centres de recherche français qui y sont soumis, avec un défaut d’attractivité des meilleurs chercheurs et un moindre niveau d’excellence des travaux.
Cette injonction obligatoire de sécurité pour la création de ZZR ne prenant pas forcément en compte le contexte peut entraîner quelquefois des pertes d’autonomie dans la création et l’innovation en France. La mise en place de ZRR peut parfois réduire le champ du recrutement des enseignants chercheurs en fonction de leur nationalité, ou diminuer la possibilité d’axes de recherche si le laboratoire ne correspond pas aux attendus de sécurité dans le cadre de la PPST.
Ainsi, l’analyse dans le secteur de l’enseignement supérieur démontre que l’injonction de sécurité inclut à dessein des marges d’autonomie sur les moyens pour atteindre des objectifs de sûreté globaux et cherche à atteindre l’adhésion de son destinataire pour améliorer sa propre efficacité sur le terrain. Cet article traite de la difficulté de mise en œuvre de ZRR au sein d’établissements de l’enseignement supérieur en prenant en compte la dualité entre la science qui doit être partagée au sens ouvert sur le monde et la protection du patrimoine scientifique et technique pour la Nation.
Cette double tension se traduit par des difficultés physiques ou logiques (digitalisation, numérisation, télétravail, nouvelle organisation, nouvelle stratégie, COVID-19…) dans la mise en place de zones à régime restrictif au sein de laboratoires.
L’article évoque les difficultés rencontrées pour la mise en place de ZRR ainsi que les vulnérabilités perçues par les directeurs de laboratoire au sein de structures de l’enseignement supérieur, afin de proposer des pistes de solutions pragmatiques d’anticipation adaptées au terrain avec un niveau d’acceptabilité correspondant au cadre réglementaire et à l’aspect sociologique particulier du monde de la recherche et de la science.