Comme toute réglementation en matière de sécurité, celle relative à la sécurité incendie a été élaborée au fur et à mesure de la survenance d'incendies catastrophiques. Ainsi, le premier acte réglementaire français a été une ordonnance royale en 1667 qui a imposé un revêtement de plâtre sur la charpente bois des habitations parisiennes, suite au grand incendie de Londres de 1666. Par la suite, les exigences réglementaires se sont étoffées graduellement, pour aboutir aux règlements actuellement en vigueur selon le type d'activité exercée : établissements recevant du public, installations classées pour la protection de l'environnement, habitations... Bien entendu, les exigences réglementaires en sécurité incendie ne touchent pas que les bâtiments ; elles peuvent aussi concerner les ouvrages de génie civil, les transports aériens, maritimes, terrestres...
L'expérience montre que certains incendies se développent à une très grande vitesse, alors que d'autres sont facilement maîtrisés. C'est la preuve qu'il est possible de réduire l'ampleur des sinistres en adoptant des mesures de conception appropriées intégrant des matériaux et produits judicieusement choisis ou des systèmes de sécurité performants, de telle sorte que ces dispositifs constructifs ou de protection s'opposent au développement et la propagation de l'incendie.
Lorsque les premiers règlements traitant de façon détaillée de la sécurité incendie dans les établissements recevant du public ont été élaborés, les connaissances sur le développement des incendies et sur le comportement au feu des matériaux et des éléments de construction étaient encore extrêmement réduites. Il a donc été nécessaire de fonder les exigences sur des principes simples et des vérifications expérimentales. En ce qui concerne par exemple la résistance au feu, le recours à un incendie conventionnel unique en est l'une des illustrations.
Ces exigences réglementaires ont donc été de nature principalement descriptive afin de permettre aux différents acteurs de la construction de les mettre en œuvre sans avoir une connaissance approfondie des phénomènes chimiques, physiques, physiologiques gouvernant l'incendie et ses effets.
Par la suite, les essais de vérification sur certains types d'éléments, ont pu être remplacés par des approches analytiques. La France a ainsi été l'un des premiers pays au monde à autoriser le calcul, par l'arrêté du 19 décembre 1975, pour déterminer la résistance au feu des éléments de structures.
Parallèlement, l'accroissement des connaissances en combustion, mécanique des fluides, analyse de risques, etc., permet maintenant la modélisation numérique du développement des incendies et l'estimation de leurs effets sur les personnes, les biens, les structures, l'environnement...
Une réglementation descriptive est destinée à couvrir la majorité des cas de construction qui peuvent se présenter, en exigeant la mise en œuvre de moyens (dispositifs considérés comme permettant de réduire le risque en cas d'incendie). L'efficacité de ces différents moyens a toujours été difficile à évaluer et il est fort probable que certains d'entre eux aient un effet insignifiant, voire nul, sur la réduction des risques : l'investissement dans ces mesures inutiles est donc préjudiciable dans l'économie d'un projet, surtout dans le contexte d'un développement durable. En outre cette réglementation, fondée principalement sur l'expérience tirée des sinistres passés, ne peut être que réactive et ne permet pas d'anticiper sur de nouveaux risques qui pourraient survenir, du fait par exemple de l'introduction de nouveaux matériaux ou de nouveaux usages des ouvrages.
À l'opposé, une réglementation définissant des objectifs à atteindre permet d'adapter les moyens de protection incendie aux risques réellement encourus. Avec une telle réglementation, fondée sur l'ingénierie de la sécurité incendie, il est alors possible de concevoir des ouvrages avec une plus grande liberté d'expression, parfaitement adaptés à leur finalité, mettant en œuvre les moyens les plus appropriés et donc présentant une meilleure rentabilité des investissements, tout en assurant un haut niveau de sécurité pour les occupants, les biens et les infrastructures.
Cette démarche a déjà été entreprise dans un grand nombre de pays tels que la Suisse, la Suède, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, le Canada, les États-Unis, le Japon...
Après avoir défini les différents types de réglementations en sécurité incendie, puis l'articulation entre la réglementation traditionnelle et celle basée sur l'évaluation de la performance, l'article expose les étapes clés d'une étude d'ingénierie de la sécurité incendie. La démarche définie en France lors du projet national ISI est présentée. L'article détaille ensuite d'autres méthodes avec leur aspect spécifique. Il est complété par l'article [SE 2 046], qui concerne des exemples d'application.