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Mesurer la stabilité oxydative des vins blancs grâce au test DPPH

Posté le par Nicolas LOUIS dans Chimie et Biotech

Des scientifiques de l'université de Bourgogne ont développé un test rapide et peu coûteux pour déterminer la stabilité oxydative des vins blancs. Des centaines d'entre eux ont été analysés afin de créer un référentiel de résultat. Ainsi, des paramètres influençant la tenue des vins blancs dans le temps ont été identifiés.

Face au phénomène d’oxydation prématurée, la gestion de la tenue des vins blancs dans le temps est un enjeu important de la filière vitivinicole. Alors qu’un vin blanc jeune se caractérise par une couleur claire et limpide ainsi que des arômes fruités et floraux, la modification de son état oxydatif au cours de son vieillissement va changer ses qualités organoleptiques, et provoquer l’apparition d’une odeur lourde, évoquant la pomme blette, la cire d’abeille rance ou encore le miel éventé. Ce processus est plus ou moins long et dépend de paramètres externes comme la température de stockage des bouteilles ou le choix de l’obturateur, mais aussi endogènes aux vins, notamment la présence de composés antioxydants à l’intérieur.

Dans le cadre de travaux de recherche menés au sein du laboratoire PAM (Procédés Alimentaires et Microbiologiques) de l’université de Bourgogne, un test appelé DPPH a été développé par l’équipe PCAV (Physico-Chimie de l’Aliment et du Vin) pour mesurer la capacité antioxydante des vins blancs. Ce terme DPPH fait référence au nom du réactif utilisé – le 2,2-DiPhenyl-1-PicrylHydrazyl –, un composé déjà employé pour procéder à des analyses colorimétriques afin de déterminer la capacité antioxydante de matrices alimentaires.

Les chercheurs ont dû adapter cette méthode pour l’appliquer aux vins blancs, afin qu’elle prenne notamment en compte l’action antioxydante des composés soufrés (cystéine, sulfure d’hydrogène, glutathion, méthanethiol) susceptibles de participer à la stabilité oxydative. Dans le but de constituer une base de données, 500 vins issus de six millésimes différents et à différents stades d’élevage, allant de la fin de la fermentation alcoolique jusqu’au vieillissement en bouteille, ont été analysés. Un référentiel de résultat a ainsi pu être constitué en vue de l’analyse de nouveaux échantillons.

Grâce à ce travail, plusieurs paramètres influençant la stabilité oxydative ont pu être identifiés. « Le premier paramètre est le millésime, qui va moduler la diversité chimique des vins et donc leur stabilité, explique Rémy Romanet, Ingénieur à la SATT (Société d’Accélération du Transfert de Technologies) Sayens et au sein de la plateforme DiVVA (Développement Innovation Vigne Vin Aliments), au cours d’un webinaire. Il est important de savoir que ce n’est pas parce que la stabilité oxydative est à un certain niveau une année, qu’elle le sera l’année suivante. »

L’ajout de levure sèche inactivée semble être bénéfique sur la stabilité

Les scientifiques notent aussi l’importance de l’élevage. Ainsi, lors des étapes pré-fermentaires, ils ont comparé l’ajout d’une dose de sulfite (SO2) à l’ajout d’une demi-dose de ce même composé complété par l’apport de levure sèche inactivée (LSI). « On constate, lors de l’analyse à la fin de la fermentation alcoolique, que le vin sulfité a une meilleure capacité antioxydante que le vin ayant reçu une dose réduite complétée par l’ajout de LSI, précise Rémy Romanet. Par contre, lors de l’analyse quelques mois après la mise en bouteilles, on constate que la modalité correspondant à la demi-dose de sulfite avec la LSI a une stabilité oxydative plus importante que la modalité sulfitée. D’une part, cela nous montre qu’il est important d’avoir un suivi au cours de l’élevage, car le vin est en constante évolution, que ce soit au cours de la vinification, mais aussi lors du vieillissement en bouteille. D’autre part, on constate aussi que l’ajout de LSI semble avoir un effet bénéfique sur la stabilité oxydative en apportant des composés azoto-soufrés par exemple. »

D’autres opérations pré-fermentaires ont un impact sur la stabilité oxydative, comme c’est le cas de la mise en fût. Les scientifiques ont réalisé des essais sur deux types de fûts différents et ont analysé les vins 12 mois après y avoir été stockés. L’un des fûts a permis de préserver les composés antioxydants présents dans les vins en début de vinification et d’en apporter de nouveaux grâce à une meilleure extraction en éllagitannins, un composé antioxydant présent dans les parois du fût. « Même plusieurs années après une mise en bouteilles, on constate que les vins issus de l’un des fûts sont toujours plus stables que l’autre fût, ajoute Rémy Romanet. Donc cet impact est significatif au cours du vieillissement du vin. »

Ces travaux de recherche ont démontré la capacité du test à refléter la réactivité chimique des composés impliqués dans la stabilité oxydative, en particulier les composés soufrés. Il existe déjà des méthodes permettant de mesurer la stabilité oxydative des vins blancs, notamment celle appelée RPE (résonance paramagnétique électronique), mais sa technicité et le fait qu’elle soit onéreuse la rendent difficilement transposable au monde professionnel. L’avantage du test DPPH est qu’il est simple à mettre en œuvre, rapide et peu coûteux. Cette analyse est actuellement proposée par la SATT Sayens.

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Posté le par Nicolas LOUIS


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