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Surveiller la qualité de l'eau in situ grâce à un système multicapteurs innovant

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Surveiller la qualité de l’eau grâce à un système multicapteurs innovant

Posté le par Nicolas LOUIS dans Innovations sectorielles

Regroupant dix-sept partenaires, un projet de recherche européen a débuté afin de développer un système intégrant une série de capteurs de nouvelle génération pour analyser la qualité de l'eau in situ. Grâce à la présence de trois capteurs optiques et un capteur électrochimique, il permettra de surveiller avec précision une large gamme de paramètres.

Les techniques habituelles de mesure de la concentration de substances polluantes dans l’eau consistent à réaliser un prélèvement, puis à envoyer l’échantillon dans un laboratoire pour analyse. Elles permettent d’obtenir une bonne sensibilité de la mesure, mais se révèlent coûteuses, et surtout il n’est pas possible d’obtenir le résultat des analyses sur place et en continu. Des dispositifs de mesure in situ existent, proposés principalement par des fournisseurs non européens, mais ces solutions coûtent chers, ou sont peu fiables, consomment beaucoup d’énergie, et ne détectent qu’un faible nombre de polluants à la fois. Un projet européen baptisé IBAIA1, coordonné par le CNRS et rassemblant dix-sept partenaires dont huit entreprises, vient de débuter et a pour objectif de développer un système multicapteurs de nouvelle génération, permettant la surveillance précise d’une large gamme de paramètres in situ.

Au total, quatre modules de capteurs vont être intégrés dans ce nouveau système, comme l’explique Virginie Nazabal, coordinatrice de ce projet de recherche et chercheuse CNRS à l’Institut des sciences chimiques de Rennes : «  À l’origine, nous avons répondu à un appel à projet sur la photonique, il y aura trois capteurs optiques, mais j’ai voulu ajouter un dernier basé sur l’électrochimie, car je souhaitais associer des méthodes qui sont souvent présentées comme concurrentes, pour qu’elles soient plutôt complémentaires. Il n’y a jamais de système idéal, selon les molécules que l’on souhaite détecter, parfois la méthode électrochimique est la plus adaptée, et dans d’autres cas, mieux vaut utiliser l’optique. »

Détecter des résidus médicamenteux et des pesticides

Un premier capteur optique dans l’infra-rouge moyen aura pour rôle de détecter des contaminants organiques. Le choix s’est porté sur la détection d’hydrocarbures, en lien avec les problématiques rencontrées par Cedre, une association experte en pollutions accidentelles. Un prototype va être développé pour détecter le toluène, en sachant que s’il est capable d’identifier ce composé, il pourra détecter tous les types d’hydrocarbures. Ce capteur devra aussi détecter le S-métolachlore, un herbicide, dont des résidus ont été retrouvés dans les nappes phréatiques à des niveaux dépassant les normes de qualité. Le diclofénac, un anti-inflammatoire utilisé dans différents médicaments et dont des traces ont été retrouvées dans les eaux destinées à la consommation humaine, sera lui aussi détecté.

Un second capteur dans le domaine du visible et du proche infra-rouge aura pour fonction d’identifier la présence de microplastiques dans l’eau ainsi que son niveau de salinité. « Nous souhaitons développer la technologie de la photonique sur verre, pour des aspects de respect de l’environnement, car les substrats utilisés sont hautement recyclables. Nous sommes au tout début de ce travail de recherche et le challenge est élevé. Nous allons commencer par mesurer la salinité, puis les microplastiques. »

Un dernier capteur optique, appelé optode, sera chargé de contrôler différents paramètres physico-chimiques dans l’eau tels que le pH, l’oxygène et le CO2. Fonctionnant à l’aide d’un transducteur chimique, ce type de capteur existe déjà, mais présente l’inconvénient de manquer de stabilité. « Nous allons développer des fluorophores, ce sont des membranes que l’on intègre dans ces optodes, pour améliorer les problèmes de dérive de la mesure dans le temps. Nous sommes très avancés et testons un prototype pour la mesure de l’oxygène et le pH. Il fonctionne, mais il faut l’optimiser et développer de nouveaux fluorophores dans le but d’obtenir un capteur très robuste, et qui s’adapte à n’importe quel type d’eau, qu’elle soit saline ou douce. »

Renforcer la surveillance de l’eau dans le cadre du Pacte Vert européen

Enfin, le capteur électrochimique sera utilisé pour quantifier des sels nutritifs (nitrate, phosphate) et des métaux lourds (arsenic, cadmium). Il est développé en partenariat avec Klearia, une start-up française, qui a déjà développé un prototype pour détecter l’arsenic. « Sur les nitrates, nous sommes bien avancés sur la détection en laboratoire, et nous débutons les phosphates, avant de poursuivre sur le cadmium. »

Ce projet de recherche doit s’achever dans quatre ans et est doté d’un budget de 4,8 millions d’euros. Plusieurs des quatre modules de capteur développés devraient atteindre un niveau de maturité technologique classé 4 voire 5 sur l’échelle TRL (Technology Readiness Level) qui en compte 9. Le projet IBAIA s’inscrit dans le cadre d’un renforcement des réglementations sur la qualité de l’eau en lien avec les objectifs du Pacte Vert européen, et répond à la nécessité de trouver des solutions innovantes pour leur surveillance.


1 Ce projet réunit un consortium composé du CNRS, via l’Institut des sciences chimiques de Rennes et l’Institut Foton, le LAAS-CNRS (France), l’Ifremer (France), le BRGM (France), Itodys (Partenaire CNRS Associé), l’université de Tampere (Finlande), l’université de Mons (Belgique), l’université de Pardubice (République Tchèque), l’université de Duisbourg et Essen (Allemagne), l’Institut Leibniz de technologie photonique (Allemagne), l’université de l’est de la Finlande, ainsi que les entreprises Klearia (France), Mirsense (France), Modus Research & Innovation limited (Royaume-Uni), Argotech (République Tchèque), Microliquid Sl (Espagne), Vigo System (Pologne). L’association Cedre et l’entreprise Scirpe font également partie du projet.

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Posté le par Nicolas LOUIS


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