Les années fastes d'après-guerre, baptisées les « Trente Glorieuses » par Jean Fourastié, ont conduit nos industriels à élaborer, expérimenter et valider un certain nombre de règles de gestion parfaitement adaptées à ce contexte. Ces règles ont, par la suite, été embarquées dans les progiciels de gestion intégrée, les ERP, qui équipent désormais la majorité de nos entreprises. La situation a pourtant aujourd'hui radicalement changé : la demande est inférieure à l'offre qui s'est mondialisée, les produits ont des cycles de vie extrêmement courts et les clients sont de plus en plus exigeants en termes de prix, de personnalisation et de services associés. Dans un tel contexte, ces règles productivistes ne donnent plus les résultats auxquels nous nous étions habitués et les industriels, un peu déboussolés, se tournent vers de nouvelles approches comme le Lean Management, le Six Sigma ou encore la Théorie des Contraintes.
Ce mouvement peut sembler prometteur. Nous assistons pourtant à un grand nombre de contresens et de maladresses concernant le management de ces démarches, le déploiement des outils attenants, la définition des objectifs visés et la mesure des performances obtenues. La principale cause de cette situation peut être attribuée à la non remise en cause, indispensable dans le contexte actuel, d'un certain nombre des présupposés en place, relatifs notamment à la quête de performances locales.
Ce comportement est sans aucun doute l'héritage le plus tenace et le plus néfaste des « Trente Glorieuses ». Il est donc urgent d'inventer de nouveaux modèles, paradigmes managériaux et administratifs pour déployer harmonieusement et efficacement ces démarches, et se préparer à aborder le monde turbulent dans lequel nous entrons.